– Houria Abdelouahed : « Je réalisais qu’Aischa, la femme-enfant du Prophète, pouvait être n’importe quelle petite fille donnée trop tôt en mariage. »

Houria Abdelouahed : « Je réalisais qu’Aischa, la femme-enfant du Prophète, pouvait être n’importe quelle petite fille donnée trop tôt en mariage. »

Avertissement : Ceci est un document de travail d’une traduction pour anglophones, il devait figurer à l’origine sous le texte traduit en anglais mais pour des raisons de mise en page et de présentation il était plus lisible de séparer les deux versions. Il s’agit d’extraits d’articles et/ou entrevues, afin d’introduire les idées des autrices au grand public, mais en aucun cas d’un compte rendu exhaustif de leurs pensées… Afin de mieux les connaître n’hésitez pas à acheter leurs livres ! Merci pour votre compréhension.
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Psychanalyste franco-marocaine, Houria Abdelouahed devient maîtresse de conférence à l’université Paris-Diderot après un doctorat sur Ibn Arabi. Après un livre d’entretiens sur la Violence et Islam en 2015 avec le poète et résistant syrien Adonis, elle publie « Figures du féminin en islam » puis « Les Femmes du prophète », critique fondée sur une étude des textes théologiques. Elle explicite le lien abusif entre croyances religieuses, organisation sociale et condition féminine. Dans l’un de ses articles « Voiler surveiller punir » elle explique que « La jurisprudence musulmane est basée sur la charia (loi islamique) qui place les femmes sous le tutorat des hommes.
Cette jurisprudence découle du corpus hagiographique de la Fondation qui a fabriqué une « histoire-légende » qui n’a pas pu devenir une « histoire-travail » (Michel de Certeau) car elle porte l’empreinte du sacré. La femme se trouve alors enfermée dans les filets d’un pouvoir politique qui s’exalte et se renforce de l’injonction divine. Recevant les privilèges que lui donne le Texte, l’historien (d’hier comme celui d’aujourd’hui) a fabriqué une Histoire conforme à une politique du pouvoir et à un discours de domination. Les textes des premiers hagiographes de l’islam constituent le terreau conceptuel de la servitude de la femme. Ceci doit nous amener à réfléchir sur les assises pulsionnelles de la religion musulmane. »

Son travail sur les textes religieux :

« A un moment donné, j’ai commencé à regarder comment le texte coranique parlait des femmes. J’ai désiré en savoir davantage et me suis mise à lire Tabari, historien et exégète du Coran. J’ai trouvé sa pensée très problématique du point du vue du féminin. Par ailleurs, à cette époque, mon travail clinique a changé, je travaillais avec des femmes arabes, et j’avais l’impression d’une plainte interminable. Ces patientes m’interrogeaient sur le refoulé de mon histoire individuelle et l’histoire collective. Je réalisais qu’Aischa, la femme-enfant du Prophète, pouvait être n’importe quelle petite fille donnée trop tôt en mariage. »

« Petit à petit, je me suis retrouvée avec la question du féminin et de la femme. Et j’ai commencé à prendre conscience de la parole singulière des femmes de culture arabe et musulmane, de leur plainte qui revenait de façon récurrente et c’est ce qui m’a amenée à réfléchir sur l’enchevêtrement de l’individuel et du  collectif, sur le lien : trauma individuel et le trauma comme fruit de toute une histoire et de toute une culture. »

« La culture arabo-musulmane n’est pas réductible à la théologie. Nous avons eu Averroes, Avicène, Ibn Arabi, Hallaj, Sohrawardi, Râzî. Nous avons un texte mystique, philosophique, poétique, mais c’est le texte théologique qui a triomphé et qui fait loi. Avec l’histoire de Zaïnab, beauté foudroyante que le prophète a voulue, bien qu’épouse de son fils adoptif, deux versets ont été révélés. Le premier demande aux femmes du Prophète de ne pas s’exposer dans l’espace public comme les autres femmes. Le second évoque le hijâb (le voile) pour les femmes du prophète. Aujourd’hui, le verset cité régulièrement demande aux croyantes de voiler leur jayb, leur fente. Mais cela peut être la fente sexuelle ou fessière ou l’espace entre les seins. Tabari et autres commentateurs du texte ont fait dans la surenchère, parlant des mains, des pieds, affirmant qu’il faut voiler le corps entier. «

« Du moment qu’il s’agit des femmes du prophète, le prophète étant lui-même le sacré et l’au-delà du sacré, elles sont devenues objet sacré. Aucun questionnement n’a été possible. Et ne reste possible. Sauf par des gens subversifs, transgressifs. Alors on peut penser que face à l’étrangeté du sexe féminin, l’homme s’est senti angoissé et réprimant la femme, il s’est accordé trop de privilèges.  Et comme c’est sacré, il n’y a aucune remise en question possible, mais une volonté farouche de domination qui appelle les forces du ciel contre la femme. »

« Toutes les religions monothéistes ont essayé de dompter le sexe féminin.(…)On retombe toujours sur les mêmes clichés, les mêmes règles. Le monothéisme a été une catastrophe pour la femme. Il faudrait étudier les civilisations antérieures, sumérienne, babylonienne, égyptienne, sur cette question, ce qui a été très peu fait. Pour l’Islam, c’est la « jahiliya », le temps de l’ignorance. Et c’est catastrophique. L’islam s’est vu, s’est dit, s’est exprimé comme le début de la civilisation. On efface la Mésopotamie, Babylone, les Mèdes, les Grecs, les Byzantins, les Egyptiens, c’est la négation même de l’altérité. On sait pourtant que dans le Coran, énormément de termes ne sont pas arabes, et même cela, on ne peut pas le dire. Il y a eu négation non seulement des civilisations d’avant l’islam mais aussi des civilisations existantes en même temps que l’islam, car en Arabie, les juifs et les chrétiens étaient en nombre. Il y a donc un vrai problème avec l’altérité. »

« Quand la religion n’est pas une question individuelle, mais folie de masse, elle représente un véritable danger, qui interroge toutes les disciplines, de l’anthropologie à la psychanalyse. Comment se fait-il qu’un discours insensé triomphe ? Et comment peut-on en venir à parler de féminisme islamique ? Féministe et musulmane, je veux bien : qu’une femme n’ait pas envie d’ébranler toutes les assises identitaires, je peux comprendre. Mais féministe et islamique, je n’y crois pas. Certains versets se prêtent à interprétations, pas d’autres. Lorsqu’un verset dit : « Battez-les si elles continuent à être insoumises », qu’on le veuille ou non, le verbe battre, ne se prête pas à de multiples interprétations. Et lorsque Tabari interprète le verset « Battez-les », il écrit que l’homme peut posséder la femme sans lui adresser la parole. Donc, il peut la violer. »

« Les musulmans ne connaissent pas tous ces hadith qui concernent la sexualité, comme ils méconnaissent les paroles d’Aisha sur les choses du sexe. Il faut être théologien pour les connaître, ou très curieux. Le problème dans les pays musulmans, c’est que vous avez de grands intellectuels qui, après avoir lu Kant, Hegel, Freud, Lacan ou Lévi-Strauss, ne vont pas se pencher sur ces textes qui ne témoignent d’aucun travail de pensée, du coup ils ne connaissent pas l’islam. Ou bien vous avez des imams qui lisent ces textes, mais ignorent Kant, Hegel, etc, et restent comme s’ils vivaient dans les anciennes époques. Il faut ajouter que la plupart des musulmans cultivés ne connaissent pas ces textes, ne savent pas que le prophète pouvait ordonner la décapitation d’un homme et prendre sa fille en épouse le jour même. Ils peuvent me dire que ce que je raconte dans ce livre n’a pas existé. C’est pour cela que je cite mes sources. Il suffit de lire ces textes. (…) Dans la transmission de l’histoire de Safiya — elle est devenue femme du prophète le jour même où son père, chef d’une tribu juive, et son mari, ont été décapités —, ce qui est bouleversant, c’est que le texte dit : « Elle ne parlait pas », sans jamais interroger ce mutisme, sa dimension mélancolique. Même si on n’est pas psychanalyste, si l’on s’en tient aux informations factuelles des historiens, on constate que Safiya n’a pas transmis de hadiths. Cela veut dire que même convertie, même mariée au prophète et donc mère des croyantes, sa parole n’était pas fiable, parce que juive. Les paroles d’Aisha, de Hasna, sont transmises, pas celles de Safiya. C’est une conception fermée et narcissique. Il n’y a pas d’ouverture possible. Il faut contribuer à faire connaître cette partie sombre de l’Histoire qui n’est pas très connue et qui nécessite une pensée. Il manque cruellement un travail d’historien, car nos références restent Tabari et Ibn Kathir, des auteurs des premiers siècles de l’hégire qui confondent Histoire et légende. Les Chroniques de Tabari nous apprennent que la religion musulmane s’est imposée par la force et la violence, mais nous n’en faisons rien. Car il n’y a pas de pensée sans liberté d’expression. Pour détisser le linceul, donner des subjectivités, il faut le droit à la parole singulière, il faut la démocratie et la laïcité. L’Occident a énormément gagné avec la laïcité ; tant que nous ne serons pas laïcs, nous continuerons à souffrir. Cela ne signifie pas l’abolition de la religion. Mais que chacun puisse être avec sa croyance sans l’imposer à l’autre. »

Sur le voile :

« Je me souviens très bien, j’étais encore élève, de la période à laquelle le voile a fait son entrée au Maroc par les cassettes de Kachk, par des émissions et aussi après la révolution iranienne. Il y avait une surenchère et une rivalité entre l’Iran et le wahhabisme. L’Arabie saoudite voulait vraiment envahir le terrain religieux et social plus vite que l’Iran. Et les deux ont contribué à la fabrique de cet islam-là qui n’a rien à voir avec l’islam de mon grand père ou de ma grand-mère, ma grand-mère qui a porté le haïk, a opté pour la djellaba et à l’enlèvement du voile. Et nous, petites filles, nous étions en minijupes, pantalons pattes d’éléphant, etc. Il y avait une évolution et les prémisses d’une Nahda. Les femmes étaient très porteuses de ce désir d’émancipation .»

«Les intellectuels arabes commencent à se réveiller. Mais le chemin sera long. Je suis frappée de voir les petites gamines voilées.  A la limite, chez les adultes, on peut parler d’hystérie, d’identification hystérique, de pureté comme fantasme… On peut spéculer. Mais quand il s’agit des enfants, je trouve qu’on n’a pas le droit. »

« Ibn Arabi (mystique du XIIIème siècle) écrit : « La féminité est ce qui circule dans le monde » et « Tout lieu qui n’accepte pas le féminin est stérile » ou encore : « La contemplation de Dieu dans la femme est la plus parfaite ». Comment se fait-il que la pensée mystique soit oubliée ou déniée aujourd’hui chez celles et ceux qui glorifient l’identité musulmane ? C’est comme si cette dernière n’était constituée que par les préceptes et les voies (voix) cruelles du théologique ? Où sont les autres mouvements de pensée : philosophie, poésie, érotologie, ‘ilm al-kalâm (mouvement rationaliste qui accoucha de la pensée philosophique)… ? Je me souviens de ces vacances passées au bord de la mer où la question du voile ne se posait pas. Les plages regorgeaient de familles entières (garçons et filles, mères et pères) en maillots de bain. Les grands-mères vivaient par procuration l’émancipation de leurs petites-filles. Et les mères s’identifiaient aux figures de grandes actrices égyptiennes (Faten Hamama, Hind Rustum, Madiha Yousri). Aujourd’hui, le concept d’identité revient sans cesse hanter la scène sociale et politique, mais sous forme de malaise et de symptôme. Le burkini est une manière d’afficher une différence avec les manières d’habillement occidentales. Il faut l’entendre et l’analyser comme symptôme et non l’interdire. Entendre la souffrance sous-jacente qui est une souffrance identitaire. Quel sens revêt le burkini pour ces filles nées en France ? »

« le nouveau malaise dans la culture arabo-musulmane, à travers le problème du hijâb (traduit par « voile ») pivote autour de cet entrelacs entre voir et être vu. Défaire la réflexivité entre le voyant et le visible, de telle sorte que le voyant (la femme) cesse d’être visible, tel est le malaise auquel nous confronte le problème du voile mobilisant ainsi une multiplicité de champs d’intervention et de discours : théologiques, sociaux, psychanalytiques, politiques à travers la question de la laïcité, juridique… (…) Le vocable al-hijâb (qu’on traduit par voile) n’est nullement mentionné par le Coran comme synonyme d’un quelconque vêtement féminin. Il figure comme métaphore, (…) Dans son acception matérielle, le hijâb figure deux fois comme l’équivalent d’un rideau. (…) Dans la seconde sourate, le hijâb n’est plus le signe de la spiritualité (ici de la femme qui transcende le terrestre au nom de l’amour divin), mais vient désigner l’espace privé du prophète. Le grand commentateur et exégète Tabarî (IXe siècle) donne l’interprétation suivante : « Afin de célébrer son mariage avec Zaïnab, réputée pour sa grande beauté, le prophète invita quelques amis. Mais ces derniers, après le repas, tardèrent à partir empêchant le prophète de jouir de la nouvelle épouse. Las, ce dernier dut attendre, néanmoins, le départ du dernier convive avant d’énoncer avec fermeté : « C’est un hijâb (rideau) entre vous et moi ». Le vocable, ici, est en lien intime avec la puissance du désir et la sexualité. Une autre version relate un incident survenu lors d’un repas où la main d’un convive frôla celle d’Aïcha, la jeune épouse du prophète. Dans les deux versions, ce sont les épouses de ce dernier qui font l’objet de l’intérêt coranique qui rappelle : « Ô, vous les femmes du prophète ! Vous n’êtes comparables à aucune autre femme ». Et le Coran de continuer : « Restez dans vos maisons, ne vous montrez pas dans vos atours comme le faisaient les femmes au temps du premier paganisme » (trad. Jacques Berque).

(…) Si l’on fait travailler le Texte, on se heurte rapidement à des contradictions incontournables, voire à des impasses. Les exégètes stipulent que le verset (24 : 31) ne vise que les femmes libres, et non les jawârî (les femmes esclaves) qui, parce qu’elles sont objet de vente et d’achat, dit Râzî, nécessitent le regard et l’approche palpable du corps. La femme esclave est dans l’obligation de dévoiler ce que la femme libre est appelée à dissimuler. L’habit sert également à distinguer la musulmane de la dhumia, celle qui doit payer une taxe pour pouvoir conserver sa religion. Ainsi, le voile devient un signe de discrimination. Suivant cette logique, l’habit fait le moine. « Dis-moi comment tu t’habilles, je te dis si tu es libre ou esclave, musulmane ou mécréante ». Et si l’on accepte le verset dans son acception première, celle des fuqahâ’ (les docteurs de la loi), on doit accepter l’esclavage et la séquestration des femmes dites libres dans un espace clos où tout leur être ne s’accomplit que dans la maternité et les activités domestiques.

(…) La burqa qui revient de façon récurrente dans le débat sur le voile appartient également au vocabulaire bestiaire. En arabe al-burqu’ ou al-burqa’ est un terme « fort connu, il est réservé aux dawâbet aux femmes des bédouins » nous dit Ibn Manzûr. Or, dawâb (pluriel de dâbba) désigne les montures, les animaux rampants, ou les bêtes de somme. Le vocable désigne également le chanfrein du cheval et ce que mettent les femmes sur leurs visages avec deux « brèches » (kharqân) en guise d’yeux .

(…)« Admonestez celles dont vous craignez l’infidélité (nushûz) ; Reléguez-les dans des chambres à part et frappez-les ». Il ne s’agit point d’infidélité, comme le veut la traduction, mais de nushûz. Tous les exégètes s’accordent pour dire que ce terme signifie le sentiment de supériorité, isti’lâ’ ‘alâ azwâjihinna (se sentir supérieures à leurs époux), comme l’écriront Tabarî et Râzî qui établissent une échelle dans cette taxinomie de la punition : d’abord, les réprimander, avant de les reléguer dans leurs chambres, avant de les frapper si elles persistent à désobéir. À quoi ? À Dieu et à leurs maris, répond Tabarî. Au fur et à mesure qu’on avance dans les commentaires, on est frappé par le plaidoyer pour un art « quantitatif de la souffrance » (expression de M. Foucault). La punition est réglée (frapper avec un miswak, branche d’un arbre, ne pas frapper le visage car ce dernier estmajma’al-mahâsin, le lieu de la beauté). Mais, ce qui apparaît, à première vue, comme compassion s’avère cruelle affirmation d’un droit du pouvoir et de sa supériorité intrinsèque. L’homme, dans cette taxinomie du châtiment, adopte ce qu’il considère comme « la plus grande des humiliations » à savoir posséder la femme charnellement dans un mutisme voulu et absolu. Et Tabarî de continuer : « Persister à ne pas lui adresser la parole et la posséder, est très dur pour elle (wa dhâlika ashaddu ‘alayha) ». Ou encore, l’homme la délaisse et refuse de partager sa couche jusqu’à ce qu’elle revienne vers lui (soumise) et fasse ce qu’il désire (hattâ tarji’a ilâ mâ yuhibb), ou, écrit encore Tabari, « jusqu’à ce qu’elle respecte l’impératif divin de se soumettre à vos droits »  (il s’agit des droits des époux). Le respect de l’homme devient devoir divin et la loi divine se confond avec la loi de l’homme. Trouver une technique pour y ajuster les punitions fera du corps féminin, dans cette « sémiotechnique de la punition » le personnage principal. Soit il sera châtié, soit abandonné, délaissé comme corps érogène en souffrance, traversé par le désir et l’appel à l’autre qui ne répond pas, ou pris dans l’avilissement. Ainsi, ce qui paraît relever d’une « esthétique raisonnable » s’avère une violence inouïe. Le corps est pris dans les méandres d’un pouvoir qui « s’exalte et se renforce de ses manifestations physiques ». Le système punitif est à placer dans une certaine économie politique qui assujettit le corps féminin et opère sur lui « une prise immédiate » autant physique que psychique.

(…) Lorsqu’il s’agit des femmes, les commentateurs se hâtent de mettre le divin du côté du principe masculin. Leur élocution au sujet du paradis et ce qui est promis aux hommes dans l’au-delà est, à ce titre, exemplaire. Le sexuel devient une orgie interminable et une jouissance masculine illimitée. (…) La lubricité interroge, ainsi, la place accordée aux femmes dans l’imaginaire musulman. La femme reste un corps, possédé quand l’homme le désire ou pris dans les fonctions domestiques d’ici-bas. Qu’en est-il de sa jouissance à elle ? Comment sera-t-elle récompensée ? Un voile sur sa sexualité de femme. Son destin se trouve ainsi scellé : obéissance ici-bas et chasteté dans l’au-delà. Ainsi en va-t-il des femmes.

(…)Est-ce pour empêcher la pétrification de l’homme, que la femme doit voiler sa chevelure ? À ce moment, le voile ne signifie pas uniquement la servitude de la femme sur la scène sociale, mais son assujettissement à un discours sur le corps féminin en lien avec ce qui demeure chez l’homme comme angoisse archaïque. Exemplaire est le récit que nous content les historiographes : la liquidation du Panthéon des déesses-mères de la période préislamique fut particulièrement difficile : « et, un envoyé du Prophète, chargé de mettre fin au règne d’une de ces trois déesses, dut s’y reprendre à plusieurs fois à cause de l’aspect physique monstrueux et menaçant de cette dernière. C’était « une femme abyssine, aux cheveux ébouriffés, posant les mains sur les épaules et grinçant des dents ».

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